Dans une région connue pour ses systèmes de protection sociale robustes et son engagement en faveur de l’égalité, le « Paradoxe Nordique » révèle une vérité troublante : la richesse peut être dissimulée discrètement à travers des structures financières complexes, laissant souvent les épouses, en particulier les femmes donc, dans l’ignorance lors des procédures de divorce. Les sociétés de capital-investissement, associées aux banques offshores, deviennent des outils non seulement d’évasion fiscale, mais aussi de maltraitance financière, privant les ex-épouses de leur part légitime lors des règlements de divorce.
Une affaire fiscale récente impliquant Altor Equity Partners AB, une société suédoise de capital-investissement de premier plan, illustre comment cette manipulation fonctionne. Une enquête de l’Agence fiscale suédoise a révélé qu’Altor avait transféré plus de 71 millions d’euros de « carried interest » – une forme de rémunération basée sur la performance, courante dans le capital-investissement – à travers un réseau d’entités offshore situées à Jersey. Ces fonds, transitant par des sociétés comme Altor 2003 GP Ltd et Apex Investments Ltd, étaient tenus hors de portée des autorités fiscales suédoises et, de manière cruciale, des épouses qui auraient pu prétendre à une part dans le cadre d’un divorce.
Le cas Altor et les actifs cachés
L’enquête a montré que les directeurs et employés d’Altor – cités à la fin de cet article – bien que n’étant pas directement associés aux entités offshores, détenaient des actions dans les entreprises basées à Jersey par le biais d’investissements personnels. Ce montage complexe leur permettait de profiter des flux financiers offshore tout en gardant ces actifs cachés aux yeux de l’Agence fiscale suédoise et des tribunaux de divorce. L’un des principaux acteurs, Bengt Maunsbach, qui a rejoint la société en 2004 et a joué un rôle clé dans la gestion d’investissements dans plusieurs secteurs, dont Eleda, Gunnebo, et Trioworld, a sous-déclaré ses revenus en omettant de déclarer ce carried interest comme salaire, ce qui a entraîné l’ajout de 14 979 721 SEK (1,4 million d’euros) à ses revenus imposables. Ce n’est que la partie émergée de l’iceberg, car en tant qu’associé, les enjeux sont devenus bien plus élevés. En 2020, il a retiré 88 000 702 SEK, a secrètement acheté un appartement de 80 000 000 SEK à Strandvägen 63, et semble posséder un yacht Princess 60 d’une valeur de 20 000 000 SEK, probablement acheté à l’étranger puis ramené en Suède.
Altor détient également plusieurs participations offshore, telles que :
– Aztec Financial Services à Jersey
– GP LTD, enregistré sous le numéro 84811 en février 2003
– Cetez Nominees Ltd. (2007)
– Aztec Nominees Ltd. (2007)
– Summit Investments Ltd.
– Solero Investments à Jersey
– BMAPEX
Propriétés de sociétés en commandite :
– Altor 2003 Fund (no1) Limited Partnership
– Altor 2003 Fund (no2)
– Altor 2003 Dutch Fund (no1)
Dans les procédures de divorce, un tel dispositif pose un problème unique. Lorsque la richesse est acheminée par des juridictions offshore comme Jersey, elle devient invisible dans les déclarations d’actifs nationales. Pour les ex-épouses, cela signifie que le partage financier est artificiellement réduit, rendant les règlements beaucoup plus petits qu’ils ne devraient l’être. Dans le cas de Maunsbach, les fonds ont été distribués via une « réserve de commandité général », une forme de « protection » légale souvent intégrée dans les accords de fonds de capital-investissement, masquant ainsi la véritable valeur de la richesse en retardant la réalisation du carried interest et en compliquant sa traçabilité.
Les partenaires d’Altor ont couvert leurs propres intérêts, retardant la déclaration de la valeur des parts à l’épouse, bien qu’ils aient affirmé qu’ils le feraient. Pire encore, l’équipe juridique de l’ex-épouse a reçu l’instruction de ne pas soumettre les documents fiscaux et de revenus, sous prétexte qu’une meilleure discussion de règlement pourrait en découler si l’information n’était pas rendue publique.
Le Paradoxe Nordique en action
Le « Paradoxe Nordique » est la tension entre les politiques sociales progressistes de la région, qui prônent l’égalité des sexes, et la réalité selon laquelle les outils de manipulation financière, tels que les banques offshores, protègent souvent les riches des responsabilités sociales que ces politiques promeuvent. Dans une société où la transparence est très valorisée, les cadres du capital-investissement peuvent exploiter des failles pour protéger leurs actifs des règlements de divorce et des impôts.
Dans ce cas particulier, les épouses n’ont pas accès au soutien fiscal, économique et juridique dont bénéficient les cadres dans le cadre de leur travail. Elles n’ont pas non plus les moyens financiers pour se procurer le soutien juridique nécessaire lorsqu’elles réalisent qu’elles en ont besoin, ni le capital de combat pour la bataille à venir. Un avocat interrogé dans le cadre de cette enquête a déclaré qu’il ne conseillerait pas à une cliente de s’opposer à Altor Equity Partners, car ils disposent d’un capital de combat trop élevé.
La Team Altor
Harald Mix (Partner), Bengt Mausbach (Partner), Stefan Linder (Partner), les trois principaux associés, puis Andreas Källström Säfweräng (Partner), David Hess (Partner), Giovanna Maag (Partner), Hajo Krösche (Partner), Herman Korsgaard (Partner), Jens Browaldh (Partner), Johan Reiersen (Partner), Jonatan Lund Kirkhoff (Partner), Klas Johansson (Partner), Lars Fromm (Partner), Mattias Holmström (Partner), Paal Weberg (Partner), Petter Samlin (Partner), Rune Wichmann (Partner), Søren Johansen (Partner), Øistein Widding (Partner).